C’est avec plaisir et étonnement que nous retrouvons dans Dom Juan ou les limbes de la mémoire, un Dom Juan vieillissant, qui n’a cependant rien perdu de sa superbe. Un Dom Juan faisant face aux fantômes de ses souvenirs. Patrick Rouzaud apporte tout son charisme à ce personnage libertin et délicieusement hypocrite. Une très belle adaptation du texte de Molière, signée Audrey Mas. À découvrir en ce moment au Théâtre La Croisée des Chemins.

Un face à face entre le séducteur passé et les fantômes de ses souvenirs

Chaque homme a ses failles. Derrière la carapace de séducteur, se cache un être torturé par le narcissisme, le rapport au père et la mort. Dom Juan ou les limbes de la mémoire est un superbe huis clos introspectif révélant une certaine vulnérabilité du personnage jusqu’alors méconnue. Cette introspection si intense et douloureuse sera t’elle fatale à Dom Juan? 

La mise en scène de Sonia Ouldammar, volontairement austère, confère à ce huis clos une certaine solennité qui donne au texte et à l’interprétation des comédiens toute leur dimension. L’adaptation astucieuse et intelligente d’Audrey Mas a donné lieu à quelques morceaux choisis du texte, lui donnant ainsi une modernité des plus agréables. Dès lors, Audrey Mas a transposé le texte de Molière dans l’univers fantasmé du personnage. Quant à l’interprétation des comédiens, celle-ci est brillante. S’agissant de Sganarelle, interprété en alternance par Aymeric Marvillet et Alexandre Rouquette, c’est un Sganarelle différent des représentations habituelles que nous retrouvons ici. Si d’habitude nous le trouvons espiègle, et amusant, il est, dans cette version du texte de Molière, plus sérieux, un brin intimidant, n’hésitant pas à tenir la dragée haute à son maître, Dom Juan.

S’agissant de Dom Juan, Patrick Rouzaud incarne ce personnage à la perfection. Patrick Rouzaud est Dom Juan. Doté d’une grande expérience théâtrale, je suis toujours émerveillée par l’éventail de personnages divers que peut interpréter ce grand comédien de théâtre. Il retrouve ici un personnage qui lui est cher, et son plaisir est palpable. Quel joie de le voir incarner un Dom Juan, tantôt séducteur, tantôt vulnérable, en proie au doute.

N’hésitez pas à retrouver l’article de ma complice Nathalie, Le petit monde de Natieak, sur cette pièce, ici.

Deux comédiens de talent

Aymeric Marvillet – Depuis l’âge de 9 ans Aymeric parcourt les planches de rôles en rôles, de Démétrius, Le songe d’une Nuit d’été, à Alexis Voinov, Les Justes en passant par Follavoine, On purge Bébé, Le beau Serveur Italien, Trahisons, Damis (Tartuffe) ou encore Fillipetto, Les Rustres. Hasard ou destinée ? C’est en tout cas avec admiration, passion et désir d’apprendre que celui que l’on surnomme parfois “le dernier né” évolue au sein d’Icare et fait de sa passion son métier aujourd’hui.

Alexandre Rouquette – Il a fait ses premiers pas sur les planches il y a un an après des années de cours de théâtre. Depuis il multiplie les projets avec la Compagnie Icare, en participant aux deux prochains spectacles Dom Juan ou les limbes de la mémoire et Dorian Gray. En 2018, il interprète Cinésias dans Lysistrata d’Aristophane et le Comte Riccardo dans Les Rustres de Carlo Goldoni.

Patrick Rouzaud – Acteur et metteur en scène français. Après le conservatoire d’art dramatique de Toulouse (1973-1976) où il obtient une mention de comédie, Patrick suit le cours de Janine Ferrare à Paris (1980- 1988) avant de diriger la Compagnie Icare de Naples en 1984. Il a depuis mis en scène une cinquantaine de pièces d’auteurs aussi différents que Molière (Georges Dandin, L’avare, Le malade imaginaire, Les précieuses ridicules, Monsieur de Pourceaugnac…), Jean Cocteau (Le portrait surnaturel de Dorian Gray, Orphée, Le bel indifférent, La voix humaine), Georges Feydeau (Léonie est en avance, Mais n’te promène donc pas toute nue), Marivaux (L’île des esclaves), René de Obaldia (Le défunt, dont je vous parlais ici,  Poivre de Cayenne, Le Grand Vizir), William Shakespeare (Beaucoup de bruit pour rien, La nuit des rois), Albert Camus (Caligula, Les Justes), Anton Tchekov (Le chant du cygne, Tragédien malgré lui), Jean Tardieu (La comédie des arts).

crédits photos: Théâtre La Croisée des Chemins

N’hésitez pas à découvrir cette merveille d’interprétation, de mise en scène et d’adaptation, qui donne au texte de Molière une dimension nouvelle. Ce classique ainsi revisité met en lumière les retrouvailles de Dom Juan et de Patrick Rouzaud scellant ainsi un autre adieu du célèbre personnage de Molière, dans les limbes d’une mémoire intacte. Les vendredis à 20h et dimanche à 17h, jusqu’au 4 novembre prochain au Théâtre La Croisée des Chemins. Le spectacle dure 1h. 

Théâtre La Croisée des Chemins

43 rue Mathurin Régnier

75015 Paris

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